autour du film


 Un mot du réalisateur

 Situation géographique 

 Le cinéma polonais 

Andrzej Jakimowski

 Un mot du réalisateur

Voilà l’histoire de ce film si attachant, si drôle, réaliste, tellement vrai… de ce film émouvant. Ce film hors du commun, montre une Pologne crue, une Pologne qui travaille, qui s’amuse, une Pologne qui vit, une Pologne sans fard contrairement aux idées fixes. Le film  Sztuczki , dont le titre français est Un conte d’été polonais a été tourné durant l’été 2006 en Pologne où plus particulièrement à Walbrzych en Basse Silésie, une ville ouvrière, pas du tout attractive pour les visiteurs mais qui s’illumine à travers les yeux de Stefek.
 

Andrzej Jakimowski : « Varsovie, telle que je l’ai connue dans mon enfance n’existe plus. Le climat que je recherchais pour le film existe encore dans certaines villes de province et Walbrzych traduit parfaitement l’ambiance que je voulais transmettre dans mon film. De plus, la Silésie, je la connais bien, j’ai fait mes études à Katowice et j’ai tourné plusieurs documentaires dans la région.»
 

Très peu de film polonais arrivent dans les salles en France, comment avez-vous fait pour percer avec le vôtre ?

A. J. « Faut croire que j’ai eu de la chance. J’ai fait un seul film auparavant. Pour celui là, j’ai eu la chance de trouver un distributeur en France, qui a aimé mon film et qui a décidé de le présenter au public français. Après c’est le public qui décide, s’il est présent, le film survit, d’autant plus quand il s’agit d’un film non commercial. »

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 Situation géographique 

Wałbrzych (Waldenburg en allemand) est une ville de Pologne, située depuis 1998 dans la voïvodie de Basse-Silésie dont elle est 2e plus grande ville, entre 1975 et 1998, la ville fut le chef-lieu de la voïvodie de Wałbrzych.
 

La Pologne (Polska en polonais), ou la République de Pologne pour les usages officiels (Rzeczpospolita Polska), est un pays d’Europe centrale peuplé par plus de 38 millions d’habitants. Il est bordé par la mer Baltique, l’enclave russe de Kaliningrad et la Lituanie au nord, la Biélorussie et l’Ukraine à l’est, la Slovaquie et la République tchèque au sud, et l’Allemagne à l’ouest. Le pays partage également des frontières maritimes avec le Danemark et la Suède.

Ancien État du bloc de l’Est durant la guerre froide, la Pologne est membre de l’ONU depuis le 24 octobre 1945, du Conseil de l’Europe depuis le 26 novembre 1991, de l’OTAN depuis 1999, de l’Union européenne depuis le 1er mai 2004, et fait partie de l’Espace Schengen depuis le 21 décembre 2007.

Carte de la Pologne

Wałbrzych

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 Le cinéma polonais 

I ) La naissance du cinéma polonais

A la naissance du Cinéma, les territoires polonais sont sous domination russe, prussienne et autrichienne. De 1864 à 1918, les occupants prussiens et les russes imposent aux polonais une politique d’assimilation. Ils interdisent l’enseignement légal de la langue polonaise.

Politiquement, économiquement et militairement contrôlées, les libertés d’expression, d’action et de création du peuple polonais sont considérablement réduites. C’est pourquoi, les inventions cinématographiques des chercheurs comme Piotr Lebiedziñski, Kazimierz Prószyñski ou Jan Szczepanik, ne peuvent être exploitées industriellement par un manque de capitaux dus à un désintérêt évident des milieux industriels et financiers.

En 1896, les frères Lumière peuvent aisément conquérir le marché polonais. Leur arrivée entraîne l’ouverture de salles de projections. Une concurrence sévère se met en place avec des films provenant surtout des pays d’Europe de l’Ouest, des USA et de Russie.

Il faut attendre 1908 pour voir des propriétaires de cinémas produire et distribuer le premier film intégralement polonais.

Après la première guerre mondiale, en 1918, Józef Pilsudski proclame à Varsovie la naissance de la République indépendante de Pologne. Cependant, le nouvel état polonais est plus préoccupé à combattre son inflation et à régler ses problèmes socio-économiques qu’à contribuer au développement d’un cinéma national.

Les évolutions politiques permettent à Pilsudski de devenir le véritable maître du pays, suite à son coup d’état en 1926. La production cinématographique ne bénéficie alors d’aucun soutien gouvernemental et fonctionne en s’autofinançant. Cependant, elle doit alors répondre aux critères économiques et politiques : on réalise non seulement des films à petit budget aux sujets très commerciaux, mais aussi ces œuvres sont, pour la majorité, imprégnées d’un fort nationalisme répondant aux volontés et pressions gouvernementales.

 Dès ses débuts, le cinéma de la République de Pologne commence à s’écarter du moule de narration classique des films commerciaux. Cependant, ses libertés restent restreintes. En effet, si la nationalisation des institutions cinématographiques supprime les contraintes économiques et pose les bases d’un nouveau système de production, elle impose aux films de nouvelles obligations politiques et idéologiques que dont nous allons maintenant étudier l’évolution en détail.

II) Le Congrès de Wisla

En 1949, après une purge visant « à arrêter toute menace impérialiste », le Parti PZPR reste seul politiquement légal. Aussi, afin de consolider sa prise du pouvoir, il organise en novembre 1949, le Congrès de Wisla dont l’objectif est d’instaurer une nouvelle politique culturelle. Il y règle alors définitivement ses comptes avec ses derniers opposants et impose, en outre, aux cinéastes l’obligation:

- « d’imprégner chaque œuvre cinématographique d’un réalisme socialiste puissant »,

- de faire en sorte que leurs œuvres « affirment et stimulent les slogans socialistes ».

Les productions cinématographiques sont alors soumises à un moule très strict que l’on définit par quatre points incontournables:

1. Le rôle principal doit toujours être un « héros positif » parfait, qui doit lutter pour l’idéal socialiste et réussir sa mission.

2. La lutte des classes doit représenter le nouvel ordre socialiste en confrontation avec l’ancien régime capitaliste. L’ordre nouveau doit vaincre l’ancien.

3. Dans cette lutte, on doit montrer que le Parti tient le rôle principal, qu’il sait mobiliser et diriger les masses.

4. Les personnages doivent clairement représenter les classes opposées. Ils doivent illustrer la victoire des nouveaux sur l’ancien régime.

Tous les opposants aux nouvelles directives sont lourdement pénalisés. Même Antoni Bohdziewicz, pour avoir souhaité plus de liberté artistique, est interdit de tournage.

Constamment menacés, peu de cinéastes osent s’opposer aux directives imposées par la Commission Cinématographique du Comité Central Polonais. Le cinéma polonais se retrouve donc dans une impasse. Face aux rigides contraintes de Wisla, les scénarios répondant correctement à toutes les exigences, donnent des œuvres de propagande sans aucune originalité narrative et artistique.

III) La remise en question du Congrès de Wisla

Le 21 septembre 1950, on organise, sous la présidence d’Edward Ochab, au Comité Central Polonais (PZPR), un conseil consacré :

- à « la mise en place du plan de production de Film Polski »

- à la remise en question de la thématique des scénarios de films.

On y dénonce la mauvaise politique de Film Polski et la situation figée du cinéma polonais. On reconnaît enfin la difficulté des scénaristes à exposer dans leurs films l’ensemble des idées socialistes imposées par le Congrès de Wisla. Les délibérations de ce conseil déterminent de nouvelles orientations qui demandent alors aux films polonais de répondre au minimum à l’un des points suivants :

1. Le film doit stimuler les ouvriers à travailler d’avantage en gagnant moins d’argent.

2. Il doit présenter clairement la Lutte des classes car « Nul n’est plus exposé aux dangers de la subversion et de l’espionnage que nous. »

3. Le cinéma doit permettre aux paysans d’accepter la nationalisation.

4. Il faut que cinéma permette l’évolution psychologique du peuple.

5. Il faut montrer le patriotisme que souhaite le Parti, « réveiller "la sainte haine de l’ennemi qui est aujourd’hui l’Amérique" et en même temps montrer "comme le sentiment d’amitié qui nous unis à l’U.R.S.S. est devenu profond" ».

La majorité des œuvres cinématographiques de la Pologne Populaire proviennent essentiellement d’œuvres littéraires qui ne sont pas censurées.

IV) Les désastres de la censure polonaise

De nombreux films souffrent fortement de la politique culturelle des années 50 : on change leur découpage et leur forme sans se préoccuper du scénario initial. Par les actions puissantes de la censure, la création cinématographique devient anémique et sa finalité se résume essentiellement à inciter le spectateur à accepter son travail au sein d’une communauté pour le bien du socialisme. C’est pourquoi, devant une telle situation, les cinéastes essayent à la suite des premiers désastres du Congrès de Wisla d’acquérir plus d’autonomie et plus de liberté d’action par rapport au système qu’ils avaient eux-mêmes mis en place avec les nouveaux dirigeants politiques.

V) Les premiers pas en faveur d’une plus grande liberté de création

A ses débuts, Film Polski est dirigé par une bureaucratie lourde dont les actions sont parfois contradictoires. De nombreux films produits ne sont jamais achevés et cela entraîne de fortes dépenses sans grands résultats.

En 1952, on décide de modifier le fonctionnement du système de production cinématographique. Dans un texte de loi, on instaure clairement les différentes étapes de la production des films de fiction. On minimise les actions de la censure et des comités de lecture. Et on stipule alors que « le réalisateur répond de l’idéologie politique de son film ainsi que du niveau artistique et technique de celui-ci ».

Staline décède le 3 mars 1953, et, l’année suivante, bien que l’on ne ressente pas encore de dégel, la situation commence enfin à se débloquer. En effet, en mars 1954, au deuxième Congrès du PZPR, les règles rigides imposées par Film Polski sont encore assouplies au grand bénéfice d’une nouvelle génération de cinéastes sortis des cours de Cracovie et l’École de Lódz, et de nouveaux écrivains.

Les cinéastes interdits de réalisation depuis le Congrès de Wisla retrouvent alors peu à peu leurs fonctions et Antoni Bohdziewicz peut se remettre à tourner à partir de 1957.

Le 30 mai 1955, des cinéastes, partageant des points de vue artistique commun, s’associent pour travailler ensemble à la mise en place de la production et la réalisation de films de fiction. Ces nouvelles « associations » sont essentiellement localisées aux studios cinématographiques de Lódz et de Wroclaw. Elles souhaitent libérer la production cinématographique de la lourde administration publique en permettant aux cinéastes d’acquérir une semi-autonomie par rapport à l’Etat.

Le 1er juin 1955, quatre associations sont officiellement reconnues et deviennent des unités de production. Deux autres suivent cette même année.

Le 27 juin 1955, On critique ouvertement la dénaturation des dogmes au cours du 3ème Plenum du PZPR. La route du changement est alors ouverte.

L’année suivante, dans un projet de loi du 6 août 1956, au cours d’un conseil des ministres, on décide que « les entreprises nationales dont l’objet est la réalisation et la production de film par les unités de création sont dispensées des règles du décret du 26 octobre 1950 qui régissent les entreprises d’état ». On nomme alors, à la tête de chaque unité de production, un comité de direction qui se compose de deux directeurs artistiques (un réalisateur et un écrivain littéraire) et d’un directeur de production. Puis, on rappelle que « ce comité de direction sera indépendant mais responsable de ses actions ». L’autonomie des cinéastes, souhaitée depuis le Congrès de Wisla, est alors acquise et le rôle de la censure en est fortement minimisé.

Chaque association rassemble en son sein des réalisateurs, des scénaristes, des chefs opérateurs, des directeurs de production et des assistants. La direction de l’unité sélectionne les projets que lui proposent ses membres. Si un projet l’intéresse, elle engage l’unité à financer l’écriture d’un scénario. Puis, si ce scénario est accepté par ses dirigeants, l’unité le propose aux autorités. Alors, si elles en acceptent la production, elles débloquent les fonds nécessaires à la réalisation du film.

Les préparatifs de la production, le tournage et la postproduction des films sont effectués par l’unité indépendamment de l’Etat. Evidemment, dans le cadre d’une coproduction, l’unité peut aussi s’associer à un Studio Cinématographique. Le film achevé, il est soumis à l’appréciation d’une commission d’Etat qui décide alors du devenir du film.

La distribution et la promotion du film accepté ne sont plus sous la responsabilité de l’unité mais contrôlées par Film Polski.

Sans s’en douter, la Pologne vient de mettre en place un des meilleurs systèmes de production pour la création de films d’auteur en Europe de l’Est. Libérées de l’administration et la lourde bureaucratie et, n’étant plus sous un système commercial capitaliste, les nouvelles associations, nouvelles unités de production permettent une production filmique abondante et variée. On passe ainsi de 4 longs métrages de fiction en 1954 à 24 durant l’année 1961.

Jean-David Szczepanski.

 

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