autour du film


 Les bonus du DVD du film Mon Ami Machuca sont très intéressants et très riches d’informations sur les différentes facettes de cette œuvre.

          L’interview du réalisateur est particulièrement touchante et instructive.

 

  L’inspiration du réalisateur

Andrès Wood est le premier à aborder par le biais de la fiction cette époque où les deux camps (schématiquement « riches » et « pauvres ») s’affrontaient en manifestant dans la rue.

Le film est directement inspiré du vécu personnel du réalisateur. En effet, Wood a participé à une expérience éducative sous le régime d’Allende : enfant, il allait dans une école réservée à l’élite mais qui décida au début des années 70 d’intégrer des enfants de milieu modeste. Et cette initiative a pris fin, comme dans le film, avec le coup d’Etat de Pinochet. Andrés Wood avait 7 ans mais se souviens des militaires qui ont investi son collège.  Par contre, ce n’est que plus tard qu’il a compris ce qui s’était vraiment passé.

Le réalisateur raconte que c’est à travers le peu d’enfants défavorisés qui ont pu rester dans l’école que lui et ses camarades « ont vécu les injustices commises, les violences, les meurtres mais surtout les injustices sociales et leurs difficultés pour les surmonter ». Cette expérience l’a beaucoup marqué politiquement plus tard, à l’université.

Wood affirme également que si le film garde malgré tout une certaine note de gaieté, c’est sans doute parce qu’il a de très bons souvenirs de son enfance  remplie d’amour. Il se sent très proche du personnage de Gonzalo dans son aptitude à observer le monde.

 Andrès Wood a choisi de parler de ces années (sujet encore très sensible !) à travers des enfants car il est très difficile d’avoir du recul. Ces enfants lui permettent de donner une dimension plus émotionnelle au film : l’incapacité de changer les choses et le fait de découvrir le monde trop tôt, de grandir trop tôt constituent des thèmes majeurs du film.

 

  Les personnages et les thèmes

Le film traite globalement du thème de la perte à plusieurs niveau : perte de l’innocence, perte de la liberté, perte d’un être cher…

Et puis, pour Gonzalo, c’est tout cela et un peu plus : ce jeune bourgeois sensible et généreux découvre un autre monde qui lui suscite à la fois de la fascination et du dégoût : le monde de Machuca et de Silvana. Il s’agit pour lui, d’un éveil à la politique (sa participation aux manifestations à droite et à gauche) et d’un éveil à l’amour et au corps (à travers la relation que les deux jeunes garçons ont avec Silvana).

Gonzalo va surtout apprendre à se battre et à s’affirmer grâce à la jeune fille. En effet, Silvana semble incarner tout ce que la dictature rejette : la vérité et le courage des personnes qui osent dire ce qu’elles pensent. Silvana est libre et incarne cette liberté tuée par les militaires.

Pedro Machuca est, pour sa part, un personnage beaucoup plus énigmatique : on ne sait jamais vraiment ce qu’il pense où ce qu’il espère de son amitié avec Gonzalo.

L’amitié entre Gonzalo, Silvana et Machuca est rendue possible par l’action du gouvernement Allende et à l’initiative du père Mac Enroe. Ce personnage semble inspiré du père Whelan, prêtre américain ayant profité des idées progressistes pour intégrer des enfants pauvres dans des écoles élitistes. Celui-ci a eu de nombreux problèmes et après le coup d’Etat, il a vécu dans les bidonvilles parmi les pauvres et a sauvé beaucoup de gens de la dictature. Auparavant, il avait initié ce genre de programme aux Etats-Unis en tentant de mêler Noirs et Blancs. Il est mort 6 mois avant la sortie du film qui lui est d’ailleurs dédié. Dans le film, le père Mac Enroe, homme rude et têtu,  incarne le combat pour la justice dans toute sa sincérité.

Tous les personnages du films incarnent une attitude, un point de vue, une réalité sociale des années 70 au Chili : la grande pauvreté des gens du bidonville, la superficialité bourgeoise de la mère de Gonzalo, le pouvoir de l’oligarchie représenté par l’amant (de la mère) toujours prête à défendre ses intérêts quoiqu’il arrive. Mais des personnages incarnent également une bourgeoisie qui veut se battre pour plus de justice sociale. Tout cela est stigmatisé dans la scène 76 où on assiste à une réunion des parents d’élèves au collège.

 

  Les scènes d’affrontement social

Tous ces événements ne sont pas abordés de manière directe car le cinéaste utilise le regard et le parcours de Gonzalo ce qui lui permet de traiter plus librement le hors champ.

Gonzalo et ses deux amis « naviguent » d’une manifestation à l’autre, d’un monde à l’autre. Et ces deux univers s’affrontent violemment et ne se comprennent pas.

Pour ces scènes de manifestations, Andrès Wood raconte qu’il a été très difficile de rendre compte du Chili de l’époque les choses ont beaucoup changé en 30 ans. Il a donc fallu retoucher presque tous les décors et se baser sur des documentaires  de l’époque.

Les scènes de manifestations ont coûté chères mais étaient très émouvantes car beaucoup des 400 à 500 figurants se souvenaient avoir vécu ça 30 ans auparavant…

 

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 L’accueil du film par les spectateurs chiliens

 « On peut le trouver inacceptable », craignait le réalisateur Andrés Wood. Pourtant, à sa sortie, les Chiliens se sont précipités pour le voir et « dans l’ensemble, la critique a été favorable, mais le débat a été très vif » et « dans les salles, les réactions variaient ; selon les quartiers de Santiago, on sifflait ou on applaudissait » selon les propres déclarations du cinéaste. Il est en effet, encore très difficile voire tabou d’évoquer cette période : il subsiste bon nombre de nostalgique d’Allende et de Pinochet. Et surtout, le fossé entre les riches et les pauvres semble encore plus grand. Le bidonville dans lequel vit Machuca existe toujours.

Lire à ce propos l’article parut dans Le Monde, le 19 janvier 2005 (p.27).

 

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 L’histoire du Chili entre 1970-1989 

De nombreux ouvrages et sites internets traitent du Chili d’Allende et de Pinochet. Il s’agit pour la plupart d’écrits historiques. La connaissance de cette période de l’histoire chilienne semble nécessaire pour mieux appréhender le film de Andrés Wood.Et voici quelques références : 

Le Chili sous Allende
(1974)
Alain JOXE
Edition : Galimard / Julliard
Chili (nov 1970-janv 1974), réforme ou révolution
(1974)
Christian DESLOIS
Edition : Gilles Tautin
Chili : le dossier noir
(1974)
Edition : Galimard : Collectif, Commission chilienne des Droits de l'Homme/ Centre IDEAS, Synthèse du rapport de la Commission vérité et réconciliation, " croire au Chili ", Campagne nationale d'Education pour la Vérité et les Droits de l'Homme, Ministère des relations extérieurs du Chili, juin 1992

L'impunité au Chili, 1973-1993

1993

Jac Forton
Centre Europe - Tiers Monde

 

L’expérience chilienne
(1972)
Alain LABROUSSE
Edition : Du Seuil
Vie et mort du Chili populaire
(1973)
Alain TOURAINE
Edition : Du Seuil
Pinochet, la dictature néolibérale
(1987)
Eugenio TIRONI
Edition : l’Harmattan
Un jour d’octobre à Santiago
(1988)
Carmen CASTILLO
Edition : Bernard Barrault
 

  

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 Quelques sites :

http://www.er.uqam.ca/nobel/r27020/ : sur l’histoire du Chili

 

http://toutsurlechili.free.fr/histoire/?id=42 : sur Allende

 

http://toutsurlechili.free.fr/histoire/?id=43 : sur le coup d’Etat

 

http://toutsurlechili.free.fr/histoire/?id=67 : l’arrestation de Pinochet

 

http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_du_Chili#Le_Chili_d.27Allende : éléments d’histoire du Chili

 

http://www.monde-diplomatique.fr/2005/04/MALDAVSKY/12092 : différents articles (dont un de Raymond Aron) du Monde diplomatique sur la dictature et les tortures sous le régime de Pinochet

 

http://radiocanada.ca/nouvelles/Dossiers/chili/index.html : un beau dossier consacré entièrement aux années 1970-1989 au Chili.

 

http://www.bibliomonde.com/pages/fiche-geo-donnee.php3?id_page_donnee=98 : autre dossier sur le même thème.

 

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