La magie des ciné-marionnettes

(Page crée à partir du dossier pédagogique accompagnant le film)


Dans un texte écrit en 1946 et intitulé "Plastique animée", Ladislas Starezwitch explique la fabrication et l'animation des marionnettes.

 

"La ciné-marionnette souple se compose d'un mannequin-support, découpé en bois léger, muni de charnières, rigide, capable de garder toute position donnée ; il est à la marionnette ce qu'est le squelette pour l'être humain. Habillé de vêtements dont le tissu et la coupe n'entravent pas le mouvement. Les mains et les doigts sont en fils de plomb surmoulés de coton et recouverts de peau de chamois. La tête et le visage sont sculptés sur bois, liège ou autre matière dure ; la mâchoire mobile montée sur des charnières, les orbites pourvues de boules, les muscles modelés avec du coton, le tout recouvert de peau de chamois. Les cheveux et le maquillage donnent les derniers traits personnels à la marionnette.

La marionnette se fixe au sol (bois ou liège) au moyen de pointes fines placées aux pieds. Tous les détails qu'exige la personnalité de chaque ciné-marionnette sont du domaine de la recherche, des petites trouvailles, de l'expérience acquise et sont si multiples, qu'ils écartent la possibilité d'une indication. Le format le plus pratique d'une ciné-marionnette est de 35 centimètres environ pour les plans moyens, de 5 à 10 centimètres pour les plans éloignés comportant une vaste figuration. Pour les gros plans, la ciné-marionnette atteint quelquefois la grandeur naturelle."

Animation et prise de vue

"La prise de vue (...) se fait "image par image". Le mouvement étant décomposé et photographié dans ses modifications, par changement successif des positions de la marionnette souple (...). La projection reconstitue le mouvement ainsi décomposé (...) La technique du mouvement, quoique poussée à la perfection, ne crée que le mouvement (quelques fois nouveau et intéressant), mais ne crée pas l'âme intérieure de la marionnette. Il faut pour cela en plus de la technique encore "quelque chose" que l'animateur doit posséder en lui et en imprégner la marionnette pendant la création.

Ladislas Starewitch estime qu'il faut changer 101 400 fois les positions du ou des personnages pour faire un film de 1950 mètres, soit environ 1 heure et 25 minutes."

 

Quelques trucages de Starewitch

Animateur de génie, Ladislas Starewitch est aussi l'un des grands pionniers du cinéma d'animation. L'inventivité de ses trucages lui permet de montrer à l'écran, bien avant le Dumbo de Walt Disney, un éléphant volant.

Dans L'Horloge magique, il devance Schoedsack et Cooper et leur célèbre King-Kong en imaginant le premier une jeune fille prisonnière dans la main d'un géant. Une scène réalisée en 1928 avec des moyens artisanaux puisqu'il s'agit d'une simple succession de photomontages !

Un exemple de trucage : Nina et les marionnettes.

Les Contes de l'Horloge magique entraînent Nina, une petite fille "en chair et en os", dans l'univers des marionnettes. Mais comment faire coexister à l'écran acteurs et poupées animées, quand les uns sont filmés en "temps réel", et les autres "image par image"? Ladislas Starewitch apporte à ce problème différentes solutions.

Parfois, la petite héroïne est jouée, suivant les scènes, par Nina elle-même ou par son double de bois et de chiffon. C’est le cas par exemple de la petite danseuse sur sa boîte à musique. L’extraordinaire justesse de l'interprétation des marionnettes fait que l'œil s'y trompe et peine à distinguer le vrai du faux. Dans la Petite Chanteuse des rues, c'est le singe qui change de nature. Un vrai petit animal ( "Jacky" le singe de la maisonnée Starewitch ) accompagne Nina dans les rues, perché sur son limonaire. En revanche, quand Nina dort, la marionnette du singe entre en action. Ladislas Starewitch évite ainsi de mettre en mouvement, dans une même image, actrice et marionnette qui ne jouent pas à la même vitesse. Les deux photos ci-jointes présentent le petit singe et sa marionnette.

La deuxième n'est pas un photogramme extrait du film : c'est une photo posée, réalisée spécialement par Starewitch.